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BLOG TDAH - TCA et TDAH : un lien encore trop souvent ignoré

  • Photo du rédacteur: Adeline Loriou
    Adeline Loriou
  • 26 mai
  • 4 min de lecture

Perte de contrôle face à l’alimentation, impulsivité alimentaire, difficultés à se réguler… Et si certains troubles du comportement alimentaire (TCA) étaient influencés par un autre trouble sous-jacent ? Le TDAH, souvent associé à l’enfant turbulent, est en réalité un trouble neurodéveloppemental complexe qui persiste souvent à l’âge adulte et interfère avec de nombreux aspects du quotidien, dont l’alimentation.

Dans cet article, je vous propose un éclairage fondé sur la littérature scientifique récente sur le lien entre TDAH (Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité) et troubles des conduites alimentaires.


Le TDAH en bref


TDAH touche environ 5 % des enfants d’âge scolaire dans le monde (Polanczyk et al., 2007) et persiste à l’âge adulte dans jusqu’à 65 % des cas (Faraone et al., 2006). Ce trouble se manifeste par trois types de symptômes : inattention, impulsivité et parfois hyperactivité.

Chez l’adulte, il est souvent sous-diagnostiqué, malgré son impact important sur la qualité de vie et la santé mentale.


Un risque accru de troubles alimentaires


Plusieurs méta-analyses montrent que le TDAH augmente significativement le risque de développer des troubles de l’alimentation :

  • Les personnes avec un TDAH ont 3 à 4 fois plus de risques de présenter un trouble alimentaire comme la boulimie, l’hyperphagie boulimique ou l’anorexie (Kaisari et al., 2017).

  • Les personnes souffrant déjà d’un TCA présentent aussi 2,5 fois plus de risques d’avoir un TDAH (Kaisari et al., 2017).

Une revue systématique menée par Nazar et al. (2016) a confirmé que les personnes présentant un TDAH ont un risque significativement plus élevé de développer des troubles de l’alimentation. L’analyse montre que le TDAH augmente considérablement les probabilités de souffrir de boulimie, d’anorexie ou d’hyperphagie, et ce, indépendamment de l’âge ou du sexe. 


Pourquoi ce lien ?


Le lien entre TDAH et troubles alimentaires s’explique par plusieurs facteurs :

  • L’impulsivité, symptôme fréquent du TDAH, est fortement liée aux comportements de suralimentation ou de crises de boulimie.

  • L’inattention peut nuire à la perception des signaux de faim et de satiété, ou entraîner une alimentation désorganisée et non intuitive.

  • L’hyperactivité, elle, a été associée à l’alimentation restrictive, notamment chez les hommes (Kaisari et al., 2017).

Le cerveau des personnes présentant un TDAH recherche souvent des sources de récompense rapide, et la nourriture peut jouer ce rôle apaisant, surtout en cas de stress ou de surcharge émotionnelle.


Un frein à la guérison


Une étude de suivi sur un an menée dans une clinique spécialisée a révélé que les femmes présentant des symptômes élevés de TDAH avaient moins de chances de guérir de leurs troubles alimentaires. Notamment, les symptômes d’inattention étaient les plus fortement associés à l'absence de rétablissement.

Cela montre l’importance de repérer ces symptômes dès le début du suivi, car ils peuvent modifier l’approche thérapeutique et nutritionnelle.


Le poids et le TDAH : une autre facette du lien


Le TDAH est aussi associé à un risque accru d’obésité :

  • Les adultes avec TDAH ont 70 % de risques supplémentaires d’être obèses comparés à la population générale

  • Chez les enfants, le risque est augmenté de 40 % (Cortese et al., 2016). 

Cette donnée est importante à connaître, car le lien TDAH–poids est indépendant de la prise de médicaments, et semble persister même en l’absence de troubles alimentaires diagnostiqués. 


« Adapter nos prises en charge »


En tant que professionnels de santé, nous devons :

  • Être attentifs aux signaux : perte de contrôle alimentaire, compulsions, alimentation émotionnelle récurrente, troubles du sommeil, difficultés de concentration…

  • Dépister systématiquement le TDAH lorsqu’un trouble du comportement alimentaire ou une obésité résistante est identifié.

  • Travailler en équipe pluridisciplinaire, en lien avec médecins, psychologues, psychiatres, pour proposer un accompagnement adapté, intégrant des stratégies spécifiques au TDAH (structuration des repas, prévention des automatismes alimentaires, etc.).


En conclusion : un regard global et individualisé


Chez les personnes atteintes de TDAH, l’alimentation peut devenir une source de soulagement, mais aussi de déséquilibre. Comprendre le fonctionnement neuropsychologique de ces patients permet d’aller au-delà des recommandations nutritionnelles classiques et d’offrir une prise en charge plus juste, plus bienveillante, plus efficace.

Le lien entre TDAH et troubles de l’alimentation nous invite à changer notre regard, à faire preuve de plus d’écoute, et à ne pas considérer les troubles du comportement alimentaire comme des « caprices » ou de simples « manques de volonté ».

Vous vous sentez concerné·e ? Un proche vous semble en difficulté ? N’hésitez pas à en parler à un professionnel de santé formé à cette double problématique. Le dépistage précoce et une prise en charge adaptée peuvent vraiment faire la différence.



Exemple Quand des comportements, souvent perçus comme de la simple gourmandise ou un manque de limites, sont parfois les signes invisibles d’un TDAH associé à des troubles alimentaires.  Lorsque l'impulsivité rend difficile de ressentir la satiété et qu'on  recherche la stimulation par la nourriture, cela peut se traduire comme pour ces patients :Cet homme aujourd'hui adulte, tout juste diagnostiqué à 43 ans, qui me fait une rétrospective de son alimentation et qui me dit qu'à 16-18 ans, il mangeait un poulet entier à lui seul. Cela faisait sourire, mais aujourd'hui, il doit peser chaque aliment pour ne pas céder à une envie de manger toujours présente, compulsive.Cet enfant de 8 ans, diagnostiqué avec des TDAH, qui à peine sorti de table, demande déjà si c'est l'heure de goûter, et qui mange sans aucune notion de satiété les yaourts par 4 ou 6 à chaque fois, qui fouille et trouve les décorations de gâteaux, et même les flacons de type arôme vanille. N'importe quoi, pourvu que cela se mange. 




Nazar, B. P., Bernardes, C., Peachey, G., Sergeant, J., Mattos, P., & Treasure, J. (2016). The risk of eating disorders comorbid with attention‐deficit/hyperactivity disorder: A systematic review and meta‐analysis. International Journal of Eating Disorders, 49(12), 1045-1057.

Cortese, S., Moreira-Maia, C. R., St. Fleur, D., Morcillo-Peñalver, C., Rohde, L. A., & Faraone, S. V. (2016). Association between ADHD and obesity: a systematic review and meta-analysis. American journal of psychiatry, 173(1), 34-43.

Kaisari, P., Dourish, C. T., & Higgs, S. (2017). Attention deficit hyperactivity disorder (ADHD) and disordered eating behaviour: a systematic review and a framework for future research. Clinical psychology review, 53, 109-121.

Polanczyk, G., De Lima, M. S., Horta, B. L., Biederman, J., & Rohde, L. A. (2007). The worldwide prevalence of ADHD: a systematic review and metaregression analysis. American journal of psychiatry, 164(6), 942-948.

Faraone, S. V., Biederman, J., & Mick, E. (2006). The age-dependent decline of attention deficit hyperactivity disorder: a meta-analysis of follow-up studies. Psychological medicine, 36(2), 159-165.

 
 
 

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